Dessous les roses - Olivier Adam - 2022
Je connaissais Olivier Adam pour avoir lu "Les Lisières" (2012), livre dont j'avais parlé dans feu un de mes précédents blogs.
J'avais particulièrement aimé son regard sur notre société, son analyse si juste des particularités de notre époque, qu'il fait tenir à des personnages témoins anachroniques de leur siècle...
Sentiment confirmé avec ce nouveau roman qui me donne envie de découvrir davantage l'auteur.
Dans "Dessous les roses", comme dans "Les Lisières", Olivier Adam aborde les relations de filiation, les transfuges sociaux, la place sociale et familiale... Ici, sa plume nous emmène explorer un huis clos familial dans ses relations et son histoire, à partir des voix alternées de Claire, Antoine et Paul, lesquels se retrouvent autour de leur mère dans la maison familiale à l'occasion de l'enterrement de leur père. Ressentis, souvenirs, interprétations, toute la subjectivité d'un vécu familial réveillé et brassé dans une de ces périodes propices aux remises en question.
Autour de ces retrouvailles, il est surtout question de Paul, le jeune frère cinéaste qui puise son inspiration dans l'histoire familiale qu'il réinterprète, romançant à la fois son personnage et son vécu, dans une démarche artistique qui prend le pas sur la loyauté familiale attendue/espérée par les siens, l'amenant à écorcher sans état d'âme la sensibilité de ses proches, dans un mélange de provocation et de recherche d'acceptation.
Paul, qui a cette particularité d'être le seul à ne pas faire grincer ni le plancher des escaliers ni les gonds du portail, précision d'importance symbolique qui rappelle qu'il n'a jamais réussi à s'incarner complètement dans sa famille, sorte d'erreur de casting comme il s'en trouve parfois même dans les familles les plus unies. Paul impose presque malgré lui sa présence aussi fantomatique qu'envahissante d'égocentrisme, dans un mélange curieux de provocation et de recherche de validation.
L'histoire est sympa, mais ce que j'aime par dessus chez Olivier Adam, c'est définitivement les passages d'anthropologie critique, sans complaisance, et ce livre en offre de succulents à travers les réflexions d'Antoine :
"Comme tous ces artistes qui avaient troqué leur conscience sociale contre l'écologie, ce qui consistait essentiellement à prendre soin de leur pomme en faisant gaffe à ce qu'ils avalaient, portaient ou se foutaient sur la gueule. (...) Certains faisaient aussi le tri sélectif et buvaient du vin "nature". De vrais combattants. Les plus radicaux allaient jusqu'à ne plus trop prendre l'avion, maintenant qu'ils avaient fait trois fois le tour du monde". (p.81)
A noter également, un passage remarquable sur le processus de gentrification (p. 118).
Pourquoi "Dessous les roses" ? me suis-je demandé à la fin de ma lecture... il m'a fallu aller découvrir les paroles de la chanson de Barbara, "Nantes", citée dans le livre, pour le comprendre...